RONCQ


Un document daté du 8 juin 1921 des délibérations de la Ville de Croix nous apprend que Gabriel Pagnerre a réalisé des travaux pour la ville de Roncq. Merci à nos amis du Non-Lieu pour cette découverte.


" Aménagement, embellissement et extension des villes - Choix de l'architecte "

Monsieur le Maire expose que la loi du 14 mars 1919 oblige les Municipalités à procéder à l'aménagement, l'embellissement et l'extension des Villes. Les Commissions s'étant réunies plusieurs fois déjà pour profiter de la loi au mieux des intérêts de la Ville de  Croix, nous vous proposons de nommer Mr Pagnerre architecte agréé du Département et de Communes demeurant à Mons-en-Barœul, pour élaborer les projets nécessaires pour la Ville de Croix ; considérant que Mr Pagnerre a établi les propositions d’embellissement des Villes de Roncq et d'Halluin ; qu’il a déjà travaillé pour notre ville et nous a donné toute satisfaction en toutes circonstances. Le Conseil Municipal nomme a cet effet Mr Pagnerre. Le secrétaire. Le maire. "

Un plan de Roncq signé de Gabriel Pagnerre (1920)

Un article dans la série d'été, écrit par Florent Steinling (fsteinling@lavoixdunord.fr), est paru dans l'édition de Tourcoing de la Voix du Nord le lundi 16 août 2021


Ce plan de la ville de Roncq (section B dite du Bilmont), daté du 15 décembre 1920, est signé de l’architecte Gabriel Pagnerre. Y sont indiqués les immeubles complètement ou partiellement détruits. Le tampon porte encore la marque du seul prénom Gabriel, avant qu'il ne devienne Eugène Gabriel.


Eugène-Gabriel Pagnerre a réalisé un plan de Roncq en 1920. Dans ses constructions, l’architecte suit son tempérament fait d’inspiration régionaliste, néo-flamande et balnéaire.


L’architecte Eugène-Gabriel Pagnerre a beaucoup construit dans la métropole lilloise avant la Seconde Guerre. Mais peu d’éléments attestent de sa présence à Roncq. Sauf peut-être ce plan de la ville… 


Cela n’est peut-être qu’un simple plan de la ville de Roncq d’après-guerre, exhumé par Philippe Marcaille, archiviste. Mais, il a peut-être beaucoup plus de valeur qu’on ne le croit. Car il est l’œuvre de l’architecte Eugène-Gabriel Pagnerre. Cet architecte de la première moitié du XXe siècle, né en 1874 à Petite-Synthe, qui a beaucoup construit dans la métropole lilloise, a été remis au goût du jour grâce au travail notamment de l’association historique de Mons, puis de l’association Eugénies. 


Pour le moment, pas plus d'informations (*)


Sur le site de cette dernière, seule une mention dans une délibération de la ville de Croix évoque la ville de Roncq. « Considérant que M. Pagnerre a établi les propositions d’embellissement des villes de Roncq et d’Halluin », est-il ainsi écrit dans cette délibération de 1921, reprise sur le site consacré à l’architecte. Ce qui expliquerait donc pourquoi il a réalisé un plan de la ville de Roncq de 1920. En revanche, on a pour le moment, aucune information sur d’éventuelles réalisations dans la ville. 


On sait en revanche que la ville d’Halluin, lui doit quatre réalisations d’envergure. On peut ainsi notamment citer les bains douches, situé à l’angle des rues Jean-Jaurès et de Lille, inaugurée en 1927 et qui a fonctionné jusqu’au début des années 70. C’est aujourd’hui le centre culturel Albert-Desmedt. Un autre bâtiment est toujours debout, il s’agit de la maison du peuple, qui date de 1914, « la première commande d’État », peut-on lire sur le site d’Eugénies consacré à Gabriel Pagnerre. L’école Jules-Guesde, rue de la Lys, au Colbras et le dispensaire, rue Desmettre, ont aujourd’hui disparu. 



(*) Complément à la suite de la parution de cet article.

La réalisation par Gabriel Pagnerre, de ce plan de la ville de Roncq, daté du 15 décembre 1920, est à replacer dans son contexte. Architecte des communes, il apporte une vision urbanistique, il s'oriente vers la conception d'un habitat différent. Il n'a probablement rien réalisé lui-même mais a cherché à donner une impulsion, comme on le retrouve dans ses écrits.

Le parcours de l'architecte et notamment son difficile retour à la vie civile après sa participation au premier conflit mondial, l'a conduit a de nouvelles orientations de son activité. Une démarche qui s'accompagnera également d'une évolution de son art.

Jusqu'en 1914, Gabriel Pagnerre jouit d'une excellente réputation et sa production est abondante, sept ou huit collaborateurs travaillent avec lui. Il vient d'emménager au Vert Cottage en 1912, son train de vie est important, avec jardinier, chauffeur et gouvernante pour les 3 enfants. Ses réalisations plaisent à une bourgeoisie qui s'est bien enrichie, notamment dans le textile. Roubaix vient de connaître en 1911 une Exposition Internationale qui témoigne de cet âge d'or (voir ici)Gabriel Pagnerre obtient son diplôme d'architecte agréé en 1912, l'année du naufrage du Titanic ... et bientôt le monde va sombrer lui aussi.

Les années 20 ne sont plus les années fastes d'avant-guerre, une décade qui se terminera par une grave crise économique.

Après cinq années au cœur du conflit armé (voir ici), le retour à la réalité est brutal. Pagnerre découvre que ses sympathies bolchéviques lui valent des inimitiés, que le marché de la construction lui échappe. 
Il doit quitter le Vert Cottage en 1922, en s'installant à Lille, une adresse qu'il estime plus prestigieuse, il espère retrouver des commandes privées qui se font rares. 

Son activité se tourne alors vers les constructions publiques, la réalisation d'habitation bon-marché (HBM) avant la loi Loucheur, la conception de quelques monuments aux morts et des activités administratives (chiffrage de dommages de guerre). C'est ainsi qu'on le retrouve architecte pour des communes, avec un souci d'urbaniste (Plans de Roncq en 1920, de Mons-en-Barœul en 1925).

Très actif sur le plan syndical, il sera également écologiste avant-l'heure, en développant un élevage avicole à Oye-Plage qui sera malheureusement un échec. 

C'est alors que son art qualifié d'éclectique, va prendre la tournure du modernisme. Il fera venir Le Corbusier et Mallet-Stevens à Lille, le premier pour une conférence mémorable en 1933 et le second en défendant son admission comme directeur de l'école des Beaux-Arts.